Les Limites de la Méthode

La datation au carbone 14 est aujourd’hui considérée comme la méthode la plus précise, cependant, certains résultats se montrent parfois quelque peu contradictoires avec nos connaissances historiques actuelles sur le monde et son passé. Ceci aboutit à des interrogations, voir même à des polémiques comme dans le cas de linceul de turin. La datation au carbone 14 n’est donc pas une méthode complètement fiable. Cependant, associée à d’autres méthodes, elle permet de donner des résultats plus précis. Afin de mieux définir les limites de cette méthode nous nous pencherons sur les facteurs responsables de cette marge d’erreur, puis sur l’association avec d’autres procédés de datation permettant la modulation des éventuels erreurs, enfin, nous étudirons le cas du Linceul de Turin.

 

Les Facteurs Responsables 

La datation au carbone 14 n’est pas une méthode totalement fiable. En effet différents facteurs peuvent fausser les résultats ou les rendre trop approximatifs :

Au bout de 8 périodes de demie vie (environ 46 000 ans), il ne reste plus que 0.4% du nombre initial d'atomes de 14C et on arrive aux limites de la méthode. En fait, on considère qu'elle permet de remonter jusqu'à 30000 ans, avec une précision qui est de l'ordre d’environ 200 ans.
On a pu ainsi dater les grottes de Lascaux (17 000 ans) grâce à des fragments de charbon de bois.

D'autre part, on ne peut mesurer que la concentration actuelle de l'échantillon en 14C. Or, pour pouvoir calculer son âge, il faut connaître la concentration de 14C dans l'atmosphère du vivant de l'animal ou du végétal. On a d'abord admis que cette concentration avait peu varié au cours des âges et on a pris comme référence sa valeur en 1950.Or on a pu montrer depuis, en particulier à partir d'échantillons de bois d'âge connu par d'autres méthodes, que la concentration atmosphérique en 14C avait fortement baissé au XIXe siècle par suite du dégagement massif de gaz carbonique provenant de la combustion du charbon, carbone fossile débarrassé depuis longtemps de son 14C.
Inversement, depuis 1950, les essais nucléaires dans l'atmosphère ont fait remonter cette concentration (confère partie sur le cycle du carbone14).
Aussi prend-on désormais comme base la concentration au XVIIIesiècle, bien connue en particulier grâce aux bois, et dont l'étude de très vieux arbres a montré qu'elle avait conservé la même valeur depuis 3 000 ans.

Par ailleurs, les concentrations océanique et atmosphérique en carbone radioactif ne sont pas homogènes. C'est l'effet de réservoir : Le carbone 14 ne varie pas de la même manière dans les océans et dans l'atmosphère. Ainsi, les chercheurs observent souvent que les fossiles marins sont datés avec un retard de 400 ans. Les datations des échantillons marins doivent donc être, elles aussi, corrigées.

Enfin, les dates mesurées sont appelées dates BP (before present). Représentant une simple chronologie, elles ne correspondent pas aux dates dites calendaires. C'est seulement en examinant les cernes des arbres ou les coraux qu'il est possible de calibrer la méthode de manière à préciser les écarts entre les dates BP  et calendaires.

On peu également souligner le fait que la datation au carbone14 est trop onéreuse pour être utilisée comme traceur biologique.

La datation au carbone 14 n’est donc pas une méthode parfaire. Cependant elle demeure la technique la plus sûre et la plus employée, et d'autres méthodes peuvent lui venir en aide afin d’optimiser le calcul des âges.

 

Solution Envisagée : Association à d’Autres Méthodes

Seule la comparaison des différentes méthodes permet d'arriver à des résultats satisfaisant. Si la thermoluminescence est également un des moyens appliquant le principe de la faible radioactivité. Elle est principalement utilisée sur les poteries et céramiques, parfois sur de l'os ou du bois carbonisé, à condition qu'ils aient été préalablement chauffés. Elle permet de mesurer la quantité de radiations qu'a reçue au cours du temps un élément quelconque. Elle joue sur la capacité des roches cristallines à emmagasiner les radiations ambiantes. Le quartz contenu dans l'argile capture des électrons qu'il libère brusquement sous forme de photons quand on le chauffe à plus de 400°. En le réchauffant en laboratoire, on peut compter le nombre de photons libérés et par comparaison avec le taux de libération photonique d’un échantillon de référence dater. Cependant ce procédé est plus rarement utilisé car il est moins précis que le 14C. Ces mesures ne sont exactes qu'à 10 où 20 % près. Il ne faut pas oublier que l'on ne date jamais un monument mais son contenu. Or par exemples, des dolmens ont été réutilisés, deux à trois fois sinon plus. Ce qui nous oblige à avoir beaucoup de circonspection sur les dates quand elles sont trop précises.

L'archéomagnétisme est une autre méthode basée sur les variations du champ magnétique terrestre, et sur l'aptitude à l'orientation des particules minérales contenues dans l'argile. Celles-ci se polarisent en effet, en fonction du Champ magnétique terrestre au moment de leur cuisson .Cette technique permet de dater des céramiques et des poteries avec une rare précision: 1% d'écart sur 2000 ans. Malheureusement cela sous-entend que l'objet n'a pas été déplacé.
La dendrochronologie est la méthode de datation la plus précise, c'est l'observation de la croissance des arbres par l'étude de ses cernes. Tous les arbres d'une même essence, dans une même région donnée dessinent les mêmes cernes, qui sont porteurs d'informations et pourront être interprétés, en les comparant à des courbes de références existantes. Pour le chêne, par exemple, il existe aujourd'hui des courbes de références pour l'Europe, qui remontent jusqu’à 7000 ans.

Il existe donc diverses techniques qui permettent également de dater un objet.  Ainsi, il suffit, pour vérifier la véracité des résultats obtenus grâce à une datation au carbone 14 de comparer les âges révélés par ces autres méthodes. Cela permet de limiter l’éventuel marge d’erreur d’une datation au carbone 14, qui reste néanmoins très précise, et qui grâce à cette association, gagne en précision et fiabilité.

 

Etude de Cas : Le Saint Suaire

Le Suaire de Turin est un drap en lin ancien où est représenté un homme victime d’une torture physique et possédant des dommages corporels comparable a ceux causés par une crucifixion. C'est une relique conservée dans la chapelle royale de la Cathédrale Saint Jean-Baptiste de Turin  en Italie. Les partisans de l'authenticité pensent que c'est le linceul qui a recouvert Jésus de Nazareth quand il fut mis au tombeau.

C'est en mai 1898 qu'un photographe amateur pris le premier cliché du Saint Suaire. Le développement révéla l'image d'un homme portant les marques d'une crucifixion. Cette image aurait apparemment été imprimée sur le tissu au moment de la proclamation de la résurrection de Jésus. Depuis, de nombreux scientifiques essaient de trouver l’age véritable du linceul. Mais ce n’est qu’en 1992 que l’on utilisa la datation au carbone 14, méthode considérée comme l’une des plus sure, pour dater ce linceul. On confia au professeur Tite et à son équipe le soin de dater un échantillon du tissu.

 

Dans un rapport d’expériences menées en 1988, le professeur aboutissait aux conclusions suivantes : le tissu sur lequel est imprimé la supposée image du Christ mort (dans les jours qui précédèrent sa résurrection) daterait en fait d'une période allant de 1260 à 1390 ans. Des dates qui provoquèrent une polémique au niveau religieux, mais également au niveau scientifique. Une série d’argument suivirent afin de prouver que les dates trouvées étaient incorrectes :

les examens pratiqués par des médecins anatomistes ont en effet conclu à une parfaite reproduction d'un corps humain portant les marques du supplice de crucifixion. Les scientifiques ayant réalisé cette expérience ont précisé à l'issue de leur analyse que la perfection de la reproduction incluait des détails (notamment au niveau de l'agencement des os des pieds et de leur déformation suite au supplice) totalement inconnus à l'époque, si l'on en croit les traités de médecine parus au moyen âge.

Le seul moyen d'obtenir sur une toile de lin comme le Suaire une pareille pigmentation nécessite soit l'exposition prolongée à un flux de protons, technique n'existant pas au Ier comme au XIVè Siècle, soit l'embaumement d'un corps ensanglanté ou recouvert d'une substance azotée.

On peu donc en déduire que les dates trouvés par les chercheurs sont fausse.

 

Deux hypothèses sont alors possible : Soit il s’agit d’une erreur humaine, soit la datation au carbone 14 n’est pas une méthode entièrement fiable.

La datation au carbone 14 était à l’époque, considéré comme une prouesse scientifique, et il était très difficile d’admettre qu’elle présente une faille. L’erreur Humaine fût sérieusement envisagée, notamment à cause de certaines déclarations du professeur Tite par la suite rétractés: le bruit se répand que l'échantillon n'aurait pas été correctement préparé, et certains se plaisent à penser que l'équipe scientifique aurait ajouté à l'échantillon quelques grammes de tissus d'une époque plus récente.

Cependant, l’hypothèse d’une erreur d’ordre humaine a vite été écartée.

Des lors, on peut se pencher sur le cas d’une erreur dans la datation au carbone 14, la méthode présenterait une faille. Les raisons de ces erreurs pourraient être due :

A une pollution qu’a subi le tissu au cours des siècles.

A une contamination d’origine biologique, due en particulier à un champignon, le lichenothelia (étant un organisme vivant ,donc chargé de carbone 14 il aurait influencé les résultats obtenus)

A l'augmentation du taux de C14 sous l'effet de la température (probablement au environ de 200° C lors de l'incendie de 1532) qui aurait provoqué un rajeunissement de plusieurs siecles.

A l'augmentation du taux de C14 sous l’effet d’un rayonnement nucléaire qui serait aussi à l’origine de la formation de l’image.

Au choix d’une zone souvent manipulée et peut-être restaurée à l’aide d’un tissu plus dense recousu à une date plus récente. Des restaurations sont attestées en effet en 1534, 1694 et 1868. Ce serait l’hypothèse la plus simple, expliquant la grande différence de densité du tissu.


Il y a donc beaucoup de facteurs qui peuvent expliquer ces résultats erronés.

Cette étude de cas prouve bien le fait que la datation au carbone 14 présente une faille, la méthode, pourtant considérée comme la plus précise, n’est pas entièrement sure. De nombreux phénomènes naturels peuvent au cours du temps modifier les quantités de C14 contenus dans les corps datés et donc fausser les calculs.